Les collines étaient calmes, et tu en as profité pour aller courir, juste une heure, rien de plus, et si, quand tu as passé la porte de la villa que tu partageais avec Ezra désormais - ayant déserté votre appartement pour un changement de paysage - tu n'as rien vu d'anormal de prime abord, c'est en remarquant le silence que tu as senti le changement. Moutarde tapait sa meilleure sieste dans son énorme panier, au soleil, et il y avait ce mot, manuscrit, laissé sur le comptoir.

Ezra voulait que tu le vois dès ton arrivée dans ta pièce et tu n'as pas eu besoin de lire pour savoir que quelque chose n'allait pas, mais en découvrant son écriture, gracieuse et certaine, la certitude a fait perdre toutes les couleurs à ton visage. Tu avais entendu les échos lors de tes passages à l'Atlantis, et tu espérais qu'Ezra n'y serait pas tenté.

Vœu stupide, suffisamment pour que ton estomac soit noué à plusieurs points. Tu n'aimais pas ça. Et tu ne pouvais pas rester là à rien faire. Dix minutes à peine pour te changer, t'équiper en conséquences - récupérant le kukri qu'il te restait, l'autre volé par celui que tu aimais, sans réfléchir à où il pourrait aller, l'esprit nimbé d'inquiétudes obstruant toute logique quand tu quittes la villa au pas de course.

Les échos entendus plus tôt t'amènent au point qui te paraît le plus logique - parce que tu ne réfléchis qu'avec ta crainte, pas avec la logique Krajahr, et que malgré sa demande à ce que tu ne fasses pas de conneries, tu t'y jettes malgré tout. Deux pistolets sur les hanches, un fusil d'assaut dans le dos, et le kukri contre tes côtes, tu ne tardas pas à trouver l'endroit supposé des rumeurs.

Piscine éventrée et surtout : un nombre imposant d'agent·e·s de Netwatch en position, ce qui ne fait que renforcer la rumeur de secrets sous terre. L'idée qu'Ezra ait pu se faufiler entre elleux pour rentrer ne te semble pas incohérente, conscient des capacités agiles du netrunner. Ça reste une idée stupide, selon toi, qu'il soit parti tout seul quand tu aurais pu l'accompagner s'il t'en avait parlé. Tu espères sincèrement que, par ses mots, il sera prudent et qu'il reviendra en un seul morceau.

Ton regard bascule en direction de la piscine depuis ta position derrière un mur de la propriété, essayant d'analyser la situation et les agent·e·s présent·e·s, que ce soit pour essayer de passer entre elleux ou pour les tuer, mais tu arrives bien vite à la conclusion que : seul, tu vas en chier. Et curieusement, c'est pas aujourd'hui que tu as envie de claquer. Mais t'as choisi de contribuer à la stupidité du jour, il te reste plus qu'à assumer.

Si tu n'as rien promis à Ezra, que tu as ignoré complètement sa demande de ne rien faire de stupide, tu aimerais autant pouvoir revenir en un seul morceau et pas avec une balle ou un membre en mois. ou pire. Ne pas revenir, ou uniquement dans un sac mortuaire. Pour autant, ça ne t'empêche pas d'essayer d'analyser la situation et essayer de trouver une fenêtre - aussi mince soit-elle - pour pouvoir les dépasser.

A peine cinq minutes et ton cerveau tourne déjà à plein régime, t'imaginant changer ton angle de vue pour pouvoir faire une diversion suffisante pour pouvoir attaquer celleux qui sont face au trou, de quoi dégager cet endroit et pouvoir t'y engouffrer sans qu'iels te suivent. Loin d'être une théorie complètement délirante, ce n'est pour autant pas idéal, repose sur la supposition qu'une diversion fonctionnera et surtout : que tes balles n'attireront pas l'attention des autres. Certes, tu as un silencieux sur un de tes pistolets, mais l'acuité de ces types doit être particulièrement haute.

Pas le temps de réfléchir d'avantage, il y a une pression sur ton épaule, et dans l'état de vigilance dans laquelle tu es, tu ne tardes pas à te tourner, pistolet monté avant de relâcher toute tension en comprenant qu'il ne s'agit que de Ben et que tu n'as strictement rien à craindre de lui ; tu jures pourtant à voix basse.



Un soupir passe tes lèvres avant qu'un sourire ne remplace l'ombre de la grimace qui barrait tes lèvres, ravi de le savoir dans les parages, certain que ton meilleur ami sera un support sans failles.



Ton sourire et ton sourcil arqué s'adressent à ton meilleur ami avant que ton regard ne se repose sur les quelques agent·e·s qui n'ont toujours pas bougés.



Mais maintenant que tu le dis à haute voix, il y a un soupçon de doute. Est-ce que c'est vraiment celle ci qu'il aurait choisi ? Tu ne sais pas quand est-ce qu'il a quitté la villa, à partir du moment où tu es sorti courir. L'hypothèse qu'il soit parti ailleurs suffit à bloquer ta mâchoire, essayant de la détendre en tournant à nouveau ton regard vers Ben.