stronger

It’s never ending

It’s never right

2041 prétendre que tu avais eu une enfance difficile serait un prétentieux mensonge auquel personne ne croirait en connaissant un peu tes parents. Pour des corporatifs, tout le monde dira qu'ils étaient du côté correct, de ceux qui n'envisagent peut-être pas leur vie sans la corporation, mais qui n'iraient pas non plus jusqu'à donner leur corps et leur esprit à cette dernière. pas particulièrement affectueux ni démonstratifs, tu n'as pas grandi dans la démonstration d'affection à outrance. au contraire. même dans le privé, les émotions étaient contenues mais l'écoute était active, attentive. chaque mot précieusement conservé et entendu, chaque souvenir précieusement enregistré pour ne pas en perdre les perdre. enfant curieux, réservé, un peu maniaque ; le genre d'enfant qui refuse que l'on touche à ses affaires parce que les adultes vont les ranger n'importe comment ; de quoi attirer le sourire des deux hommes qui s'étaient trouvés une nouvelle résolution en tant que parents. un enfant qui pianotait déjà sur les touches de l'ordinateur quand il traînait, un enfant qui suivrait probablement les pas de ses parents adoptifs.




Seven Nation Army, fightin' at the bar with you l'adolescence était une autre partie de plaisir à laquelle tes parents n'étaient pas préparés. turbulent, défiant, parfois même provocateur ; les hormones en furie et le manque d'affection physique amenant cette personnalité tactile, touch-starved. l'âge du numérique, des premiers hackings de la sécurité de tes parents sans te douter qu'ils avaient fait exprès de baisser pour que tu puisses t'exercer, mais tu te pensais si invincible quand le verrou sautait et que tu sautais sur le trottoir avec ce regard plein de bêtises. découvrir les bars, les soirées, les lumières de Night City vues autrement que par le prisme de ta fenêtre corporative. Première cigarette sur le rebord du trottoir, premier coquard et se rendre compte que les poings, c'est pas pour toi, premier baiser sous les feux d'une scène libre après avoir hurlé du samurai toute la soirée, les lèvres gercées de bière, le goût de la malice et du désordre, de l'innocence. premier amour sous les feux d'artifice de la fête nationale, loin, trop loin des bordures de city center. premières funérailles, quand le i love you s'est terminé par des sixth street ayant décidé que vous étiez pas là où vous deviez être, brûlure dans les poumons à force de courir, ne pas voir la silhouette derrière toi, entendre l'ambulance. premier cœur brisé, premières crises de larmes, la chaleur des bras de tes parents, l'impression d'un monde qui s'écroule pour la première fois. les limites définies, l'adolescence terminée.




2059 à peine sorti de l'école que tu fonces déjà dans les mains de la corporation d'évidence. avec les années, ce qui était un passe-temps un peu obsessionnel s'est révélé être une compétence pour laquelle tu avais des facilités ; tu n'étais pas un génie comme certain·e·s de tes collègues, mais ton aisance était évidente. c'était comme si tu avais fait ça toute ta vie, avant même d'apprendre à lire, à écrire, à savoir comment le monde fonctionnait. les premiers mois n'ont pas été simple, et l'égo était mis à rude épreuve d'être relégué à des tâches qui te semblaient triviales mais que tu compris, bien plus tard, comme étant malgré tout essentielles pour que le rouage corporatif fonctionne. tu te plaisais dans cette corporation, à ce poste, là tu étais. et puis, tu as mis le nez, pour la première fois, dans un plongeon dans le cyberespace. dire que ta vie a changé serait presque un euphémisme. more, more, more, tu en voulais toujours plus, toujours plus d'heures, toujours plus intrigué, toujours plus curieux, jusqu'à ta première rencontre avec une IA sauvage, exfiltré du blackwall, libre comme l'air. une fascination qui te prenait aux tripes, qui t'expulsa en dehors du cyberespace avec des migraines comme tu n'en avais jamais eu auparavant. le prix de la curiosité.




widespread illness militech. un grand nom pour pas grand chose, selon toi. unité militaire au service du gouvernement, même s'il t'arrivait de te demander si ce n'était pas parfois l'inverse, mais à ta position, tu n'avais pas le luxe d'avoir des opinions. Non, pion parmi les pions, déployé sur le terrain, dans ces barraques où les netrunners étaient laissés pour gérer les affaires de bombes. tes parents t'avaient offert une moralité, mais elle était toujours différente quand on provenait des corporations. au départ, tu ne savais pas ce que tu programmais, ce que tu calibrais. on ne te donnait pas les informations, et chaque hacking que tu essayais pour craquer les informations te renvoyait sur un mur aussi ferme que le blackwall, les autorisations manquantes, les permissions retirées. réduit au silence comme un animal, à obéir aux ordres. de ces deux ans, tu ne gardes que l'amer souffle de la mort qui tâchait tes vêtements, et surtout, la rencontre avec Caïn. Parfaite copie, traits similaires, visage animé par la même curiosité. un jumeau. impression d'être complet quand tu as passé des années à sentir un vide dans ta poitrine sans savoir d'où il venait. netrunner pour Militech, qu'il était, aussi fatigué que toi. aussi épuisé. mais on ne part pas de Militech si facilement. tu le savais, il le savait. tu as enduré ton mandat, à ses côtés, c'était plus simple. la connexion s'est faite si naturellement, comme si vous vous étiez toujours connu. C'était évident. Si normal. Confrontation faite aux parents, les tiens curieusement plus souples sur une vérité qui n'était pas si cachée, juste dissimulée. Caïn devient comme un membre de ta famille, le lien se fait, se tisse comme une araignée fabriquerait sa toile. c'est fucking si simple que ça brûle en toi de de ne pas l'avoir su avant. point de départ de recherches qui prendront bien longtemps avant de germer, des noms en pagaille.

I, Cecil, do solemnly swear

that I shall faithfully serve the New United States of America.

2063 une mission au HQ de new york, et c'est tout ce qu'il a suffit pour que tu rencontres l'équipe des NUSA, que l'on t'approche. tu n'as jamais vraiment su pourquoi toi, les raisons exactes à ce que l'on t'approche et que l'on te présente une offre que tu n'étais pas vraiment en mesure de refuser. il n'y avait pas de coercition, de pression, mais le regard seul de la présidence des NUSA était suffisante, la FIA dans ton dos, et si tu n'avais pas de pistolet contre ton cou, leurs yeux te scannaient comme prêt à te faire disparaître si la réponse était non. mais tu as dis oui, parce que tu crois aux opportunités, tu crois en ce que tu aurais pu récupérer de ça, tout ce que tu avais à y gagner. tu avais bien plus à y gagner qu'à y perdre. le seul point était d'être discret, que ça ne devait être su par personne, ou presque selon toi. confiant dans tes capacités de netrunning, suffisamment pour penser pouvoir planquer ce genre d'informations à la FIA, mais tu savais qu'ils allaient te scruter, les premières années, que tu serais autant leurs yeux qu'ils auront les leurs sur ton dos. tu as donc marché et pris le rôle, et les avantages. surveiller netwatch, rapporter tout ce que tu voyais, anormal ou non. revenir à la corporation, après tes deux ans à Militech, avec cette tâche dans le coin de ton crâne, c'était différent, c'était étrange. puis, tu as rencontré Zhenka qui est devenu ton meilleur ami, et tu as monté en grade, tu as trouvé le poste que tu cherchais, la vocation dans les doigts. tu n'avais aucune idée de si les NUSA tirait les ficelles. tu n'en savais rien, et tu ne voulais pas le savoir. t'es son témoin de mariage, à Zhenka, trois ans plus tard, et tu pleures comme tu le fait rarement dans un speech avec un peu trop de champagne dedans.




It ain't nobody's business il y a Tommy qui déboule dans ta vie comme un boulet de canon, à coups de flirts et d'œillades entendues sur un contrat régulier. c'est bête, comme l'amour te fait changer, te faire sourire un peu plus, te redonne un peu cette jeunesse que t'as perdu quand t'as enterré ton premier copain. tactile au possible, une communication physique plus que verbale, entendue. les familles se rencontrent, et tout fonctionne. tu n'y croyais pas à l'époque, que ce soit si simple même quand ça crie, même quand ça marche pas forcément. parce que ça marche pas toujours. ça crie parfois, ça s'engueule, ça se réconcilie, et ça marche. il rencontre même Caïn alors que vous arrivez enfin au but, touchant du bout des doigts la rencontre d'un premier membre de cette fratrie dispersée, comme un premier point sur la carte mondiale que vous essayez de reconstituer à deux. projet spécial qui vous intrigue, vous passionne, qui vous rend d'autant plus proche, qui vous pousse à comprendre, à essayer de trouver les morceaux dispersés. Fraternité particulière qui pulse dans la poitrine, comme si les liens avaient toujours été là avant même d'être révélés par la supercherie d'un père ingrat qui n'a toujours rien fait que disparaître.




breathe

2074 bip. bip. bip. ça commence comme ça, le bruit des machines, le silence plat, la couleur aveuglante de ce blanc hospitalier que tout le monde détester passionnément. ça commence comme ça, mais c'est même pas le début, mais c'est pas la fin non plus, et t'en as aucune idée. plongé entre la conscience et l'inconscience, les médicaments rendent tout groggy, tout impossible à lire, à comprendre, à vivre, t'as l'impression de sombrer, t'as l'impression de partir. t'as l'impression qu'à tout moment, c'est fini. tu te souviens de tes derniers mots, quand tu te réveilles, tu te souviens de la voiture qui a pilé en face de vous, tu te souviens pas de ce qui vous a percuté, mais tu te souviens du choc, de la voiture, de la douleur, partout, tout le temps. la tempe contre le bitume, le verre éparpillé, la mort sur le bord des lèvres. l'impression de tromper le temps et la vie. l'impression que t'allais mourir sur le pont qui reliait Westbrook à City Center. Quand tu peux ouvrir les yeux, il manque quelque chose, il y a quelque chose qui pèse, qui rend tout plus lourd alors que tu sens le poids qui est différent. Ta jambe ; tu te souviens d'avoir supplié, d'avoir quémander dans l'ambulance de la Trauma Team, d'avoir pleuré entre la douleur et la peur. On te dit que ça pourrait être pire et si c'est vrai, tu refuses de l'entendre. Tommy va bien, et en toi, ça t'enrage, y'a quelque chose de fissuré. Tu vois les mois devant toi, l'angoisse lente qui va te prendre aux tripes. Tu te souviens encore de Caïn qui a coupé le cordon parce que ça devenait toxique pour tout le monde, la douleur de la rupture, le cœur en miettes, la rééducation trop lente pour toi. la vie, qui ne marchait pas. la rencontre avec Ben dans ton enfer personnel, un ami, quelqu'un qui te connaissait pas d'avant, pas d'à priori, pas de jugement, pas de regard extérieur, un confort. Tu rencontres Robin Hood et sans t'en rendre compte, tu es introduit aux Outlaws où est Wyatt, le mari de Zhenka. Tu les rejoins, ça te donne quelque chose pour canaliser cette colère dans la poitrine, cette douleur dans chaque membre de ton corps. Caïn te force au monde, glisse sous tes yeux fatiguesune bonne nouvelle, un nouveau membre de cette fratrie au grand jour. Le timing est pas bon, le timing est froissé, mais tu y vas. Tu ne regrettes pas, tu ne regrettes jamais. C'est toujours chaud, c'est toujours réconfortant. Mais ça aurait pu être pire.

breathe




You can't wake up, this is not a dream personne ne parle de la sensation que ça fait de mourir, et selon toi, toutes les religions sont fausses, toutes ces foutus religions ont tort et ne connaîtront jamais la sensation cruelle qui vient avec la mort. personne ne parle de la douleur de se sentir mourir, et de se réveiller en ayant la vive sensation d'avoir trompé tout le monde, d'avoir foutu tout en l'air, même quand ce n'était pas ta faute. Non, ils ont décidé pour toi, ont décidé de te mettre en danger pour t'extraire de la corporation, de mettre Zhenka en danger. ça t'enrage. mais au-delà de ça, tu ne pensais pas que ça te ferait aussi mal de voir ton nom et ton prénom sur une stèle au Colombarium, après que tout le monde ait quitté le cimetière, à l'exception de ton meilleur ami et ton jumeau. Tu aurais probablement tirer sur la détente sans eux, sans les Outlaws. Tu ne pouvais pas pas prendre de contacts hâtifs, Tommy a été pour épargner ton jumeau et Zhenka qui prenaient déjà trop de risques, et savoir que tu ne pouvais pas contacter Ben a été un poignard supplémentaire dans cette vie que tu enterrais, dans tous les rêves que tu laissais aux portes du Blackwall. C'était pour le mieux qu'on te disait. Un moyen de protéger tes proches ; Ben, tes parents. Tu détestais l'idée, tu la détestes toujours. La douleur ne s'efface jamais vraiment, elle se substitue à autre chose. La colère. La fatigue. Le corps emmêlé. Tu savais que tu voulais quitter la corporation, mais tu ne pensais pas qu'ils s'en mêleraient, qu'ils viendrait à foutre la merde de cette manière, et tu ne pouvais rien dire. ce n'était pas une proposition, c'était un ordre, que tu le veuilles ou non.

last

breath

negotiation's over