Neuf heures et quelques. Et huit minutes tu dirais. Ton horloge interne marche toujours, tu le sais, mais c'est ton réveil qui n'a pas coopéré. Ce n'est pas dans tes heures de réveil habituelles. Tu t'es senti te tourner avant, mais tu n'étais pas vraiment là, moins lucide que d'autres nuits, plus assoupi, moins conscience des alentours. Ironiquement, tu sais pertinemment que c'est à cause de ces mêmes alentours que tu as pu sombrer plus profond.

Tes yeux s'ouvrent paisiblement, redécouvrent le monde comme tous les matins. Mais le monde a changé depuis quelques jours, et même si le changement est souvent synonyme de mouvement, d'adaptation, tu sais que c'en est un qui équilibre ton monde plus que de raison. Tu pourrais probablement consulter un spécialiste pour le taux d'endorphines stratosphériques que te procure le simple fait de regarder Reed dormir, craignant sans doute devenir addict - trop tard. Tu te réfrènes au moindre mouvement, contact de plus, te concentre simplement sur ses paupières closes que tu discernes à peine comme il est appuyé sur ton épaule. Te fait probablement un shot mental de cette paix communicative, avant de te décider à te lever.

Ce shot a pris quarante-cinq putain de minutes que même ton horloge interne n'a pas réussi à capter.

Tu retires son bras avec la plus grande douceur, parce que tu sais qu'un des points qui vous oppose, c'est le côté matinal. Tu sais qu'il va bouger, mais s'il ne se réveille pas complètement, ça te va. Tu t'assois sur le bord du lit alors qu'il se tourne, soudain pincé au cœur par ce détachement. Et tu retrouves rapidement ton côté responsable, intimant à ton amoureux transi adolescent interne que, non, tu peux décemment pas passer une journée entière à juste dormir avec lui dans son putain de lit.

Tu souris connement à la pensée, à l'hypothèse que c'est faisable. Pis tu secoues ta tête, pour retrouver ta raison, glissant sur la pente des sentiments sans aucun contrôle et en en ayant bien conscience. For fuck's sakes, que tu te jures à toi-même avec un sourire, en te levant pour attraper ton jean. C'est donc de ça qu'ils parlent dans les livres, dans les films, ce qui rend les gens fous, quitte à tuer ou mourir.

Tes affaires du jour enfilées, tu hésites une seconde avant de laisser tes fringues de nuit ici - tu y reviendras. Tes yeux se posent sur Reed, provoquant cette fugace pensée. Bien sûr que tu tuerais pour lui. Et il est trop tôt pour se le demander, pour culpabiliser dessus, mais tu commences à comprendre qu'il y a peu de limites que tu n'irais pas dépasser pour juste lui permettre de dormir aussi paisiblement qu'il le fait là.

Tu reviens te pencher sur le lit, hésitant une seconde. Un sourire arraché par son être pourtant inconscient - putain, quel pouvoir n'a t-il pas ? Tu viens doucement effleurer sa tempe de ton front, le contact est infime, et tu y restes une poignée de secondes avant de reculer un peu pour te pencher plus haut, à la naissance de ses cheveux, et y déposer tes lèvres avec une tendresse que tu sais condamnée à ces murs, pour l'instant - et le sentiment de ce cocon protecteur, de cet espace rien qu'à vous, te fait un bien fou.

Tu te redresses pour sortir, fermer la porte sans un bruit, et traverser le camp jusqu'à ton trailer. Il n'y a encore personne de réveillé, outre Raza sur son éolienne, désignée pour la garde cette nuit. Peut-être la plus matinale avec toi finalement. Tu te frottes les yeux en marchant dans le sable, regardant sans y penser le camp, vérifiant avec un automatisme maîtrisé, que tout va bien, sans avoir même vraiment besoin de regarder consciemment. Tu bailles, t'étires en avançant toujours - tu es peut-être matinal, mais ça ne veut pas dire que tu es bien réveillé de suite. C'est que la torpeur de ce sommeil là, tu veux garder son résiduel sentiment, pour qu'il dure le plus longtemps possible.

Malheureusement pour toi, il allait s'arrêter immédiatement à ton entrée dans tes prémices.

OH FOR FUCK'S SAKES- OH PUTAIN DE MERDE-

Tu lâches avec stupeur, faisant un bond - ta main immédiatement sur ton cœur, qui, pendant une seconde, t'a donné l'impression qu'il allait se décrocher pour tomber à tes pieds tellement tu as eu peur. La quiétude de la matinée envolée, tu es plus que bien réveillé, et tu serres ta veste, jusqu'à sentir tes ongles sur ta peau à travers les deux tissus, tellement ton cœur bat fort. Tu devrais directement répliquer à Jude mais tu es trop concentré à récupérer ton rythme cardiaque, qui, en deux mois, a eu la vie vraiment difficile.

Tu restes encore un peu stoïque pendant qu'il finit de parler - ou plutôt glousser comme une dinde - mais tes sourcils légèrement froncés trahissent le fait que si tu aimes les blagues, tu aimes aussi la vie. Et qu'il va falloir que les gens de ce camp arrêtent de jouer avec ton organe le plus vital comme si c'était un putain de ballon de football.

Tu soupires en roulant des yeux, quand tu sens enfin les battements s'espacer davantage, laisse ta main retomber pour revenir aussi sec, plus haut, masser tes tempes. Tu allais répondre, mais ça ne vient pas de suite. L'index et le majeur qui pince l'arête de ton nez alors que tu regardes au-dehors, essaye de formuler une réflexion que tu sais vaine. Trouver la force de dire à Jude d'aller se faire foutre directement pour éviter le pire - mais ça n'a jamais été ton job les menaces. Ta main retombe pour de bon, et tu vas vers la porte, pour regarder au-dehors une seconde avant de la fermer. Et avant de t'asseoir sur ton lit, tu lui snatch le Capri-Sun des mains.

You owe me sugar for my heart you almost fucking stopped. Again. Tu me dois du sucre pour mon cœur que t'as failli faire s'arrêter. Encore.

La référence évidente se voulait à tes propres mésaventures, mais en réalité, tu faisais plutôt une mention implicite qu'il ne capterait pas, à son coma. Tu plantes la paille dans le paquet avant de siroter, pas pressé de lui donner une réponse, les yeux qui se baladent dans ton trailer à la recherche d'une porte de sortie que tu ne veux pas vraiment trouver. Mais tu dois d'abord lui énoncer les conditions, celle qui, visiblement, son rentrées par une oreille et sorties par l'autre l'autre soir.

First of all. It's TEN IN THE MORNING. Yes I'm awake early but don't you know decorum ? Secondly- I will not blame you for this. He will and I won't stand in his way if he learns it. De un. Il est DIX HEURES DU MAT' Oui je me lève tôt mais t'as pas de manières de bienséance ? De deux. Je vais pas te blâmer pour ça. Il le fera et je m'interposerais pas s'il l'apprend.

Tu soupires, hausse les épaules, retourne à ta paille parce que le jus d'orange frais calme un peu tes pensées en furie. C'est Jude. Tu es aussi bavard que lui et la vérité terrifiante est que tu aimerais tout partager avec lui.

Thirdly- Reports ? Y un jamòn* con estos ? It is enough you almost scare me to death but to ask me like you're my boss ? You gotta start working on that survival instinct. De trois- Des rapports ? Et une pipe aussi ? C'est déjà ça que tu manques de me tuer de peur mais de me demander des rapports comme si t'étais mon boss ? Tu dois vraiment commencer à taffer sur cet instinct de survie.

Tu soupires, finis ton Capri-Sun que tu poses sur le côté, et cherche une nouvelle façon de calmer tes nerfs fraîchement secoués. Tu sors la clope de ta poche, l'allume déjà bien plus calmement, tire quelques bouffées avant de reposer ton regard sur Jude. Hésites, mais a déjà perdu de toutes façons.

Ask away. But go too far and I'll hand you to Reed myself. And wipe that grin off your face. You know I know you can attack me like this. Doesn't make it right. But if it's worth risking your kneecaps... Demande. Mais va trop loin et je te donne à Reed moi-même. Et efface ce sourire fier de ta face. Tu sais qu'je sais que tu peux m'avoir comme ça. Ça veut pas dire que c'est bien. Mais si ça vaut le prix de tes rotules...

Sourcils haussés en sa direction en tirant une nouvelle fois sur la cigarette - et on peut lire dans ce regard cette envie quand même de partager un peu, que tu peux pas taire en tant qu'imbécile heureux. Et plus encore, une provocation, légère mais bien présente. T'es un gamin, comme lui, et ce serait mentir de dire que tu t'amuses pas de ces conneries.


*y un jamòn ? (et un jambon ?) est une phrase espagnole qui signifie que quelqu'un abuse et en demande beaucoup, l'équivalent français de et une pipe avec ça ?

Tu te masses les tempes, essayant de passer la migraine à venir - celle provoquée par le fait que tu donnais, à chaque minute, un genre de pensée du poisson rouge, un bénéfice du doute sur le fait que Zac comprenait les mots, pouvait les choisir en toutes connaissances de causes.

Of course he said kiss. Of fucking course he did.

Tu le laisses finir de te torpiller, vomir son ADHD en crise comme il le fait souvent - te disant quand même que c'est pire cette fois, et que tu sais pertinemment pourquoi, et bizarrement, ça t'amène à être moins sec. Vraiment facile à malmener, cette conscience que tu as. Manquerait plus qu'il te dise qu'il a une maladie terminale et des enfants à nourrir, et tu lui donnerais tout ce qu'il veut savoir. Putain.

Oh you just want everything ? JUST everything ? Aren't you a very bad negociator starting with that and then asking the one thing you know you should REALLY not ask ? Oh tu veux juste absolument tout ? JUSTE TOUT ? T'es vraiment un mauvais négociateur à commencer avec ça et ensuite demander LE truc qu'il fallait pas aborder.

Tu passes ton pouce le long de l'arête de ton nez, ta clope entre ton index et ton majeur. Grande inspiration. Tu peux le faire.

Let's start with you knowing. Commençons avec le fait que tu savais. Tu plantes tes yeux bruns dans les siens, avec l'assurance de celui qui ne se laissera pas désarçonner. You knew absolute jack shit. Tu savais que dalle.

Pour la simple et bonne raison que toi-même, tu n'en savais pas vraiment grand chose, il y a encore très peu. Tout s'était enchaîné très vite après ce stupide Truth or Dare - que tu ne regrettais en fait absolument pas - et tu n'avais pris le temps du recul qu'après, le lendemain.

Second, seduce ? Are you out of your fucking mind ? Please, PLEASE, entertain me with how you think someone could seduce Reed. Like actually seduce, like flirting with words and moves. I would LOVE to hear your theory. Secondement, séduire ? Est-ce que t'as pété les plombs ? Pitié, PITIÉ, divertis moi avec comment tu vois ça, de séduire Reed. Genre vraiment séduire, du flirt avec des mots et des moves. J'ADORERAIS entre cette théorie.

De un, parce que ça sonne comme une putain d'histoire hilarante à entendre. De deux, parce que si t'avais du le faire, toi qui n'avait aucun mal à avoir à peu près qui tu voulais dans un bar, tu n'avais aucune idée de comment tu aurais fait pour choper quelqu'un comme lui. Tu n'étais même pas sûr que cela était dans son vocabulaire. Mais l'hypothèse te fait spiraler un peu, te demander soudain comment Reed en est arrivé à cette conclusion.

Quelle conclusion d'ailleurs ? C'est quoi les mots qu'il t'a dit déjà ?

Vite, sortir des sables mouvants. Tu as déjà Jude à gérer pour l'instant.

Third. Kissed. Yes, we did, or moreso will. Do you know how ? The sweet kiss of FUCKING. DEATH. if you don't start retaining those intrusive thoughts of yours. So no, I will not answer that. Troisièmement. Embrassé. Oui, on l'a fait ou plutôt, on va. Tu sais comment ? Le doux baiser de la PUTAIN de MORT. si tu commences pas à retenir tes pensées intrusives. Donc non, je vais pas répondre à ça.

Il est trop tôt. Tu aurais été deux fois plus malléable s'il ne t'avait pas sorti aussi brutalement de ta torpeur agréable après avoir ouvert les yeux sur Reed. Toi, du mauvais pied le matin ? C'était vraiment une première.

I'm going into town today, to get you books or movies, I don't give a shit about the medium, but actual romcoms because it looks to me you are on a ROLL and if you continue focusing on us too much, your last hookup will be your last forever. Je vais en ville aujourd'hui, te choper des livresou des films, on s'en fout du medium, mais des romances parce qu'on dirait que t'es ON FIRE et que si tu continues de focus sur nous, ton dernier hookup va être ton dernier pour TOUJOURS.

Tu finis ta clope, reste sur ta lancée, hausse un sourcil curieux.

When was that by the way ? 'Cause you sound horny as hell and it seems out of control. C'était quand ça d'ailleurs ? Parce que tu sonnes super horny et surtout, hors de contrôle.

T'esquisses un sourire de celui qui retire son masque, qui l'engueulait absolument pas depuis le début, parce qu'il aime trop Jude pour ça, qui est juste mal réveillé mais qui au fond, s'amuse un peu quand même, même si ça le fait chier de l'admettre.

Is that what it will take ? I speak about sex and you in the same sentence the more crude I can and you will leave me alone and keep your kneecaps ? 'Cause you fucking know I will. Est-ce que c'est ce que ça va prendre ? Je te parle de cul et de toi dans la même phrase, le plus crûment que je peux, pour que tu me laisses tranquille et que tu gardes tes rotules ? Parce que tu sais très bien que putain, je vais le faire.

Tu ne réagis pas à nouveau à son affirmation, retenant tes pupilles de rouler au fond de tes orbites, ayant peur de les bloquer dans cette position si tu le fais trop - et s'il continue de rabâcher que oui, il avait senti quelque chose, ça allait p'têt bien arriver.

Comment aurait-il pu ? Ça ne t'avait même pas percuté toi, le plus perspicace du camp probablement. Mais tu n'es pas rancunier, tu sais lâcher un morceau - tu lui laisses, sans commenter. Tu sais qu'il devrait avoir un instinct de survie assez solide pour ne pas balancer ça d'un air arrogant à Reed.

...

Non t'es pas vraiment sûr de ça.

Mais tu espères.

Le and... après le me rattrape ton attention au vol - la diversion a fait son effet, l'appât a attiré le poisson. C'est que Jude est une cible facile, très facile à lire, à titiller - et c'est pour ça que ça pète avec Reed. Tu peux voir aisément les points où ils sont similaires, ceux où ils sont opposés. Ce qui, dans les deux cas, permet de comprendre pourquoi il n'y a pas de fumée sans feu.

C'est la différence entre le lieutenant et toi. Quand il t'avoue un péché, tu la fermes, complet, pas une réaction qui passe sur ton visage, sinon qu'une légère surprise dans les yeux à la confession entière. Tu devrais être heureux - tu devrais. C'est Jude, et il te confie quelque chose de beau, quelque chose de fort, quelque chose que tu as toujours souhaité pour lui, au fond de toi, à chaque fois qu'il te racontait ces histoires de "baise" au fond d'une ruelle.

Pour peu que ce soit qualifiable de "baise" même, ce serait faire une offense au terme - qui n'est pas vraiment super gratifiant de base.

Ton sourire ou même ta tension, le tout tombe un peu, te laisse avec une mine légèrement triste alors que tu regardes le sol de ton trailer. T'es pas complètement heureux parce que tu vois les échecs qu'il te confie, d'abord - puis vient ton inébranlable culpabilité, toujours au poste pour venir te tabasser dans les règles.

Tu étais vraiment en train de culpabiliser pour être tombé amoureux de ton lieutenant, et croire que ça te rendait fautif quelque part quand les histoires amoureuses des autres allaient mal, juste parce que tu jouais la tienne à domicile. T'avais vraiment un souci de ce côté-là.

Tes mains s'entremêlent, maintenant débarrassée de la clope, alors que tu réfléchis à comment lui répondre. Ce signe distinctif que personne ne comprendrait avant longtemps - voire jamais - tes mains se trouvant toujours quand tu pensais à Reed. S'unissant fermement quand tu étais à l'aise, tes doigts jouant de manière maladroite et anxieuse quand tu ne l'étais pas.

Don't be sorry Jude. Sois pas désolé Jude. Ravaler ta culpabilité, même quand elle bloque la gorge - ton empathie en travers du chemin, qui veut te forcer à imaginer ce serait quoi d'être netrunner et de tout perdre d'un coup, comme lui. I'm glad it helped a bit. Je suis content si ça a aidé un peu.

Un sourire désolé en le regardant, une seconde, avant de fixer le vide à nouveau, tes paumes qui glissent l'une contre l'autre.

I should yell at you I guess for going out alone, network or not. But- Je devrais te hurler dessus je suppose d'être sorti seul, réseau ou pas. Mais- Tu soupires, hausse les épaules. That would be hypocritical of me. I ain't sure of what I would do if Reed was in the city and I was supposed to not go and see him. Ce serait hypocrite de ma part. Je sais pas ce que je ferais si Reed était en ville et que j'étais supposé ne pas aller le voir.

Tu sais très bien ce que tu ferais. Tu te souviens encore du sentiment résiduel de paix absolue qui t'avait envahi en te réveillant à côté de lui ce matin. Tu te rappelais de tes mots. You make it so easy, Reed. Tu rends tout ça si facile, Reed. Tu le pensais toujours, tu en étais même davantage convaincu chaque nouveau matin qui se levait sur le camp. Alors bien sûr que comme un adolescent en mal d'amour et accroc à sa drogue, tu passerais outre les règles établies, qu'importe les conséquences.

Tu passes ta main sur ton menton, hésite une seconde - rien qu'une seule, pas besoin de plus.

Tu tiendrais tête à celui que tu aimes pour que d'autres puissent vivre le même sentiment.

I won't yell. But I need you to tell me how many times you already went when you weren't supposed to. Je vais pas gueuler. Mais j'ai besoin que tu me dises combien de fois t'as déjà été alors que tu devais pas.

Tes yeux se sont reposés sur lui, pour capter toute son attention, lui offrir ta sincérité, ton empathie légendaire, ta compréhension sans bornes, au creux de tes iris.

I need to know who's the guy. Where you're at now, with him. What you did, said. The big picture. J'ai besoin de savoir qui est le mec. Où t'en es là, maintenant, avec lui. Ce que t'as fait, dit. En perspective.

Regard le plus franc qui soit, pour achever ton speech de la façon qui résonne le plus - ta loyauté pour chacun des Sonorans est sans limite, ton sens du sacrifice ? Si tu avais neuf vies comme les chats, tu les aurais déjà toute distribuées sans hésiter.

And then, we'll fix it. If you tell me he's... he's it for you, I'll help you. Et après, on va réparer ça. Si tu me dis qu'il... Que c'est le bon pour toi, je vais t'aider.

Tu te penches un peu en avant, vient poser ta main déliée de l'autre sur son genou, un instant.

You won't lose him. And I can't tell you much about us, but we can talk about feelings you know. Tu vas pas le perdre. Et je peux pas te dire grand chose sur nous, mais on peut parler de sentiments tu sais. Ton sourire revient, avec cet air idiot - la connerie arrive, pour clore le tout. You're not a pain in the ass Jude. But I wish that soon, you will be in someone else's. The good kind of pain. [intraduisible jpp]

Tu ris, doucement, brisant tout le sérieux que tu avais réussi à maintenir tout le long de la phrase. Tu retires ta main, haussant les épaules, genre désolé mais qui l'est que dalle.

Sorry, had to. And plus, I'm pretty sure you're a bottom- Sorry, too far, it comes so easy. Désolé, j'devais. Et en plus, je suis sûr que t'es un bottom- Désolé, trop loin, ça vient tout seul. Que tu conclus en levant les mains, faussement innocent, le rire facile - essayant juste de le déclencher chez Jude aussi.

Et juste comme ça, il se confie. Non pas que ça te surprenne, c'est ton putain de job - et tu le fais à merveille. Tu sais pour ainsi dire tout, de chacun foutu membre des Sonorans. Des choses qui les terrifient à leurs couleurs favorites, des faits infimes aux informations plus lourdes. Rien qui t'effraie, rien qui te repousse, rien qui te fait reculer ou détourner le regard.

Tu l'écoutes, toujours aussi patient, toujours aussi calme et compréhensif, ne souhaitant qu'irradier quelque chose de rassurant, pour ne pas qu'il prenne peur, pour qu'il aille jusqu'au bout. Plus stable qu'un roc, le même qui a dû tenir face à la tempête il y a plusieurs dizaines d'heures maintenant. Tu n'iras pas jusqu'à dire que chaque partie de sa soirée a été agréable, mais elle a renforcé une de tes convictions les plus établies : si tu peux y faire quelque chose, tu essaieras. Quitte à te faire envoyer chier, quitte à t'en manger une, à t'entailler profondément - rien à foutre. Tu ne reculais plus. Pas même devant les mots qui parviennent à tes oreilles, la mention d'un corpo - évidemment - c'est rien. Tu peux le gérer.

Tu pensais, naïvement, avoir bien réussi à dévier ton sujet, à avoir donner tout l'espace nécessaire à Jude pour se confier - ce qu'il a fait en réalité - mais tu ne l'as pas vu revenir direct sur celui que tu as essayé d'esquiver. C'est qu'il perd pas le Nord, lui non plus. Tu hausses les épaules, lève les mains en signe de capitulation - illusoire, parce que tu sais garder un secret.

You heard the man. We're a thing.

Sans aucune critique ou aucun jugement sous-jacent, tu reprends simplement les mots de Reed, balancés ce soir-là d'un coup, sans prévenir plus que cette main dans la tienne, ce regard, et hop, c'était parti, comme ça, aussi simplement et rapidement qu'un claquement de doigts. Mais te reposer sur ce mot, ça t'aide et ça t'aide pas. C'est quoi, a thing ? Une définition sûre et certaine, ce serait : la seule chose que tu peux dire à Jude.

And I'm pretty sure he would agree with me on that fucking stupid shit you just said- Et je suis quasi sûr qu'il serait d'accord avec moi sur le truc putain de stupide que tu viens de dire- Tu fronces un peu les sourcils, pas méchamment, juste pour faire comprendre ton message. Don't try to understand why he wants you. A lot of people would be lucky to have you Jude. I mean it. And anyone saying otherwise can eat my fucking phalanges. You included. You want a taste ? No ? Essaye pas de comprendre pourquoi il te veut toi. Beaucoup de gens auraient de la chance de t'avoir Jude. J'suis sérieux. Et quiconque veut dire l'inverse peut bouffer mes phalanges. Toi inclus. Tu veux y goûter ? Non ?

La menace qui n'en est pas vraiment une, parce que tu lui mettras pas une droite, jamais. Mais qu'il comprenne que tu ne le laisseras pas parler de lui-même comme ça, pas devant toi. Tu hausses les épaules, l'air toujours sérieux, qui ne prévient pas du tout de la connerie que tu vas sortir ensuite.

Maybe he wants you 'cause you're a virgin. You know, to sacrify you with a bunch of candles for a virtual god, named like Xurubo the third ruler of the underworld. Peut-être qu'il te veut parce que t'es vierge, t'sais, pour te sacrifier avec des bougies, pour un dieu virtuel qui s'appelle genre Xurubo le troisième maître de l'outremonde.

Tu peux pas t'empêcher de retenir ce rire à ta propre blague, qui détruit tout ton sérieux - qu'ils s'inquiètent, les Sonorans, le jour où tu seras à court de conneries. Tu te masses les tempes, comme fatigué de tes bêtises, pour retrouver un semblant de fermeté mais pas trop, les lèvres toujours étirées - parce que tu sais pas comment faire autrement.

Of course you got yourself a corp' otherwise my job wouldn't be as funny. Évidemment que tu t'aies trouvé un corpo sinon mon job serait pas aussi marrant. Petit claquement de langues désapprobateur. But it's not like you choose who you fall in love with I guess. Mais c'est pas comme si on choisissait de qui on tombait amoureux je suppose.

Tu te tais, un plus long moment, l'air pensif, réfléchissant déjà à une stratégie. Toujours sur le qui-vive, toujours au taquet. Même s'il avait trouvé le courage - et la débilité - de venir te réveiller à 5h pour ça, tu serais dans le même état. Touché par sa vulnérabilité, par la confiance qu'il t'alloue, et prêt à tout pour le rendre heureux, comme chaque membre de cette foutue famille.

The one then. Melchior though- It rings a bell. You ever mentioned him or shown him to me ? C'est le bon donc. Melchior par contre- ça me parle. Tu me l'as déjà mentionné ou montré ?

Ça gratte un coin de ta tête, sans réussir à poser le doigt dessus de manière précise.

Before I tell you I'm going to help you, specifying first of course that you don't leave anymore until I got my plan ready, just tell me this : he isn't a stupid crazy religious corpo, right, that would suck Saburo's dick if he was given the opportunity, or any type of psycho like this ? 'Cause I'm no fucking Jesus Christo Jude, I don't do miracles. Avant que je te dise que je vais t'aider, en appliquant évidemment ma condition que tu ne partes plus avant que je t'ai échafaudé un plan, dis moi juste ça : c'est pas un corpo fou religieux, hein, genre qui irait sucer la bite de Saburo si on lui donnait l'opportunité ou ce genre de malade ? Parce que je suis pas Jésus Christ Jude, je fais pas de miracles.

Demandé au fond des yeux, l'index légèrement levé, prêt à voir s'il va édulcorer la vérité. Parce qu'il va pas te mentir, tu le sais pertinemment, mais t'as besoin de toutes les infos, et pas leurs versions joli packaging pour faire plaisir, pour voir comment approcher le problème.